Chagrin d’entreprise ?

–  « – Chaque salarié (élève) joue son instrument, ce n’est pas la peine d’aller contre. Le délicat, c’est de bien connaître nos musiciens et de trouver l’harmonie. Une bonne équipe (classe), ce n’est pas un régiment qui marche au pas, c’est un orchestre qui travaille la même symphonie. Et si vous avez hérité du petit triangle qui ne sait faire que ting ting, ou de la guimbarde qui ne fait que bloïng bloïng, le tout est qu’ils le fassent au bon moment, et qu’ils soient fiers de la qualité que leur contribution confère à l’ensemble. Comme le goût de l’harmonie les fait tous progresser, le petit triangle finira lui aussi par connaître la musique, peut-être pas aussi brillamment que le premier violon, mais il connaîtra la même musique.

Elle eut une moue fataliste :

–  Le problème, c’est qu’on veut leur faire croire à un monde où seuls comptent les premiers violons.

Un temps :

–  Et que certains collègues se prennent pour des Karajan qui supportent mal de diriger l’orphéon municipal. Ils rêvent tous du Philharmonique de Berlin, ça peut se comprendre… »

Veuillez excuser Monsieur Malaussène, pardon Monsieur Daniel Pennac, cet emprunt à votre très émouvant livre « Chagrin d’école ».

En vivant votre récit, je n’ai pu m’empêcher de penser qu’après l’école, l’entreprise produit aussi ses cancres quand le manager pointe ce qui ne va pas sans jamais adresser une parole ou un regard bienveillant à son collaborateur, « néglige » de reconnaître l’effort accompli, s’intéresse à ses « bons éléments » sans accorder aux « moins bons » le bénéfice de le devenir.

Quand le manager « ose l’individu », il se donne, lui aussi, les moyens de conjuguer, avec son équipe, le « présent d’incarnation ».

Chagrin d’école – Daniel Pennac (Gallimard)

Stress au travail : Entreprise coupable ? Entreprise complice ? Entreprise victime ?

Coupable : de ne pas avoir su adapter son management à l’évolution de la production qui a destitué une industrie de la réalisation au profit d’une production dématérialisée où le salarié est de moins en moins en lien avec le produit final. Le reporting a remplacé la visualisation de l’objet réalisé, l’application des procédures qualité s’est substituée à l’utilisation des palmers et autres pieds à coulisse, les impératifs du marché (achat matières, coûts de production, pricing, cycle de vie du produit…) envahissent les ateliers comme autant de concepts au partage … parcellaire.

Complice : en refusant d’aborder le mal être au travail de peur de le catalyser. Dans ce domaine aussi, comme le veut la sagesse populaire, la peur n’écarte pas le danger. Fermer les yeux, c’est prendre le risque de les ouvrir plus tard sur une situation d’autant plus inextricable que chacun aura constitué son stock d’animosités, de rancœurs.

Les relations humaines ne dérogent pas à la règle : Il est plus facile (et profitable !!!) de solutionner un problème par anticipation que lorsqu’il est effectivement posé au tableau noir des préoccupations. L’anticipation ne crée pas le problème, il n’existera pas si les données de l’équation ne sont pas réunies, encore faut-il s’en assurer….

Victime : d’un environnement sociétal où l’individu est balloté entre assistanat et déresponsabilisation, l’entreprise récupère dans ses rangs les enfants qui ont grandi en marge de l’autorité familiale, les élèves qui ont déserté les bancs de l’école privilégiant leurs droits à leurs devoirs et à qui elle oppose un manager qui est là car il a, qualité suprême de distinction managériale, « fait le tour » de son poste précédent.

Le stress au travail n’est ni une affabulation médiatique ni une fatalité,  c’est « juste » une réalité plus au moins prégnante selon l’importance accordée par l’entreprise à la reconnaissance de chacun de ses salariés, à leur responsabilisation, dénuée d’injonctions paradoxales (qui fleurissent sans attendre le retour du printemps) : « Sois autonome et lève le petit doigt pour chacun de tes actes », « Préserve ton équilibre de vie et reste bien connecter le week-end à ton smartphone »…

Pour donner sa chance à l’autre, et aussi pour se donner, à soi, sa propre chance d’acteur responsable de sa vie, il importe de considérer que l’autre en face a une valeur, une intelligence et que si elle n’est pas visible c’est qu’on n’a pas, peut-être, tout mis en œuvre pour la découvrir, la décoder, la révéler.

Manager : Prendre le temps de décider vite…

Le manager est un homme attendu. Attendu par son patron sur l’atteinte des objectifs fixés (ou négociés s’il s’agit d’un vrai grand patron). Attendu par son équipe sur sa capacité à décider vite (au passage aussi, sur son courage à assumer ses décisions, mais là c’est un autre sujet).

Chacun sait, dans sa sphère professionnelle comme personnelle d’ailleurs, que prendre une décision dans l’urgence ne rime pas souvent avec pertinence. Pourtant la réalité du monde de l’entreprise pousse le manager à prendre rapidement ses décisions.

Combien de temps le manager peut-il accorder à sa réflexion ? (… Un certain temps, Merci Fernand).

Deux facteurs (La Poste ne recule devant aucun sacrifice) entrent en jeu :

la confiance que lui porte son équipe. Le temps de réflexion sera soit assimilé à sa compétence (capacité à évaluer les enjeux) soit à une authentique tergiversation mettant à mal son statut de décideur et donc de manager.

L’intérêt qu’il porte, au quotidien, à chacun de ses collaborateurs et à son équipe (entité à part entière). Intérêt qui lui permet d’appréhender, en temps réel, les signaux forts et faibles, leviers ou freins à la réussite de l’option choisie.

Ainsi, la prise de décision sera d’autant plus rapide et pertinente que le manager aura anticipé l’urgence.

Comment ? En étant à l’écoute de tous les éléments de communication qui ne passent pas (et tant mieux) dans le workflow !!!

Accompagner les acteurs de l’entreprise sur leurs scénarios professionnels !