Stress au travail : Entreprise coupable ? Entreprise complice ? Entreprise victime ?

Coupable : de ne pas avoir su adapter son management à l’évolution de la production qui a destitué une industrie de la réalisation au profit d’une production dématérialisée où le salarié est de moins en moins en lien avec le produit final. Le reporting a remplacé la visualisation de l’objet réalisé, l’application des procédures qualité s’est substituée à l’utilisation des palmers et autres pieds à coulisse, les impératifs du marché (achat matières, coûts de production, pricing, cycle de vie du produit…) envahissent les ateliers comme autant de concepts au partage … parcellaire.

Complice : en refusant d’aborder le mal être au travail de peur de le catalyser. Dans ce domaine aussi, comme le veut la sagesse populaire, la peur n’écarte pas le danger. Fermer les yeux, c’est prendre le risque de les ouvrir plus tard sur une situation d’autant plus inextricable que chacun aura constitué son stock d’animosités, de rancœurs.

Les relations humaines ne dérogent pas à la règle : Il est plus facile (et profitable !!!) de solutionner un problème par anticipation que lorsqu’il est effectivement posé au tableau noir des préoccupations. L’anticipation ne crée pas le problème, il n’existera pas si les données de l’équation ne sont pas réunies, encore faut-il s’en assurer….

Victime : d’un environnement sociétal où l’individu est balloté entre assistanat et déresponsabilisation, l’entreprise récupère dans ses rangs les enfants qui ont grandi en marge de l’autorité familiale, les élèves qui ont déserté les bancs de l’école privilégiant leurs droits à leurs devoirs et à qui elle oppose un manager qui est là car il a, qualité suprême de distinction managériale, « fait le tour » de son poste précédent.

Le stress au travail n’est ni une affabulation médiatique ni une fatalité,  c’est « juste » une réalité plus au moins prégnante selon l’importance accordée par l’entreprise à la reconnaissance de chacun de ses salariés, à leur responsabilisation, dénuée d’injonctions paradoxales (qui fleurissent sans attendre le retour du printemps) : « Sois autonome et lève le petit doigt pour chacun de tes actes », « Préserve ton équilibre de vie et reste bien connecter le week-end à ton smartphone »…

Pour donner sa chance à l’autre, et aussi pour se donner, à soi, sa propre chance d’acteur responsable de sa vie, il importe de considérer que l’autre en face a une valeur, une intelligence et que si elle n’est pas visible c’est qu’on n’a pas, peut-être, tout mis en œuvre pour la découvrir, la décoder, la révéler.